lundi 30 juin 2008

L'audio-visuel en émoi

Tout le microcosme résonne des remous de la réforme de l’audio-visuel, où chacun voit midi à sa porte. J.F. Copé, ravi des décisions du Président, en dépit des entorses faites au rapport de sa commission. A. Montebourg se fait plaisir à trouver des mots excessifs pour masquer des propos convenus sur la mort annoncée du service public.

Derrière la façade, l’analyse est un peu courte. Aussi courte que l’annonce –il y a déjà plus de 20 ans !- par Philippe Léotard du prétendu « mieux-disant culturel » que devait produire la privatisation des antennes publiques d’alors…

Or le débat pourrait nourrir aujourd’hui de nouvelles réflexions, car il se déroule à fronts renversés :

o Sarko et la Droite libérale soutiennent une réforme « au nom de la défense du service public » en supprimant la publicité, tout en taxant les fournisseurs d’audiovisuel privés.

o La Gauche revendique le maintien de la publicité qu’elle n’a cessé de vilipender au nom de l’indépendance et de la qualité du service public ; oubliant que l’audimat était depuis des années l’un des critères de pression, conduisant France 2 notamment à lorgner du côté des paillettes de Bouygues ou de Berluconi !

Ce renversement de position est certes tactique et opportuniste. Sarkozy poursuit sa pêche dans le camp de gauche, pour brouiller les cartes et affaiblir l’adversaire : après les évocations de Blum et Jaurès, l’instrumentalisation de Guy Moquet, après le succès des ralliements à sa cause des Jouyet, Besson, Kouchner, il ne lui déplaît pas de reprendre pied dans l’audiovisuel pour faire oublier sa chute d’image et reconquérir une audience indispensable aux échéances futures.

Pour la gauche, c’est plus délicat ; elle n’est pas en capacité de choisir les cartes. Elle est sur la défensive, avec deux arguments difficiles à manier : la publicité comme garantie de l’indépendance du service public ? c’est l’arme libérale par excellence ; le refus de l’augmentation de la redevance ? c’est l’arme inutilisable dans le contexte de baisse du « pouvoir d’achat » alors que c’est l’un des rares moyens fiables pour conforter et pérenniser une offre publique de qualité.

Au-delà de la tactique, c’est bien pour le pouvoir présidentiel un choix stratégique : organiser et revendiquer l’audiovisuel entreprise publique, à l’image des autres où l’Etat actionnaire principal définit, oriente, incite, autorise et nomme le responsable. En semblant respecter les règles du C.S.A. et la volonté du parlement, mais en fait en reprenant la main, comme au temps de l’ORTF et de la « TV Peyrefitte ».

Est-ce bien sûr que tout parti candidat à l’exercice du pourvoir ne se plairait pas à maîtriser une position analogue ? Les socialistes offusqués aujourd’hui ne seraient-ils pas prêts à se couler dans le moule, comme Mitterrand le fit de la constitution de 1958 après l’avoir tant vilipendée ?

En tout cas, ils sont rares ceux qui osent dire la vérité : ou l’on paie une redevance élevée et l’on peut obtenir la TV publique souhaitée, ou l’on y renonce et l’on a –peu ou prou- une télé de béton ou des berlusconneries à volonté.

Ils sont rares également ceux qui ont tenté de donner une réponse globale. Télérama a édité un excellent dossier sur la question ramassé en dix propositions. Quel homme ou femme politique, quelle contribution actuellement déposée pour le Congrès P.S. de l’automne, osera le reprendre à son compte ? Puis le mettre en œuvre ? A suivre …

Zarafouchtra

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